PARTIE 3 Les découvertes scientifiques remettent-elles en cause l’autorité de l’Eglise ?
1- L’Eglise face aux découvertes scientifiques : les découvertes scientifiques contrent-elles l’enseignement de l’Eglise ?
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Introduction : Le contexte religieux à la Renaissance
La Renaissance est marquée par de nombreux conflits et divisions religieuses. Avec l’invention de l’imprimerie de nouvelles idées et connaissances se diffusent. L’Eglise catholique, représentante de la première religion en Europe, est extrêmement puissante et commet beaucoup d’excès. Elle s’éloigne des commandements qu’elle même prône, ses évêques vivent dans le luxe, le pape est devenu souverain. C’est pourquoi certains humanistes souhaitent une réforme et la religion se divise. Apparaît alors au XVIème siècle un nouveau courant religieux : le protestantisme*.
Les réformes religieuses de la Renaissance (source)
Impulsé en Allemagne par le moine Martin Luther ce mouvement revient aux fondamentaux de la Bible et est fondé avant tout sur la foi, rejetant les sept sacrements, la vierge Marie et les Saints. D’autres mouvements comme le courant évangélique découlent du protestantisme. Cette rupture religieuse fragilise le pouvoir de l’Eglise.
1- Un tribunal pour juger les hérétiques : l’Inquisition
Depuis des siècles, les catholiques s’éloignant de la foi ou ne respectant pas le dogme* de l’Eglise risquaient l’excommunication*. Cependant, en 1231, le pape Grégoire IX décide d’instaurer en France un tribunal chargé de traquer et condamner les hérétiques* : l’Inquisition*. Des Inquisiteurs sont alors envoyés pour enquêter et interroger les suspects. Ces derniers risquaient une pénitence comme un pèlerinage obligatoire, des emprisonnements, de la torture voire la mort (principalement sur le bûcher).
La Sainte Inquisition, Francisco Goya (source)
Les scientifiques sont également touchés par cette nouvelle pratique.
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L’ouvrage de Copernic : “De Revolutionibus Orbium Coelestium” est condamné par l’Inquisition et sa doctrine doit rester à l’état de théorie. Ayant eu l’intelligence de publier son ouvrage peu avant sa mort Copernic n’eut pas d’ennui avec l’Inquisition de par la lenteur de la communication de l’époque. En effet, peu de gens eurent accès à son ouvrage qui mit du temps à se répandre.
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S’il n’était pas savant, les théories sur l’univers du Dominicain Giordano Bruno lui valurent le titre d’hérétique. Après avoir refusé d’abjurer il est condamné au bûcher le 17 février 1600 à Rome.
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Après avoir appris la condamnation de Galilée, Descartes renonçe à publier son “traité du monde et de la lumière” dans lequel il soutenait la thèse de l’héliocentrisme par peur d’être réprimé par l’Inquisition.
2 - Le procès de Galilée
Galilée lui-même est touché par l’Inquisition. Dans un premier temps, il est soutenu dans son travail par le pape Urbain VIII avec qui il était ami. Son livre “Dialogues sur les deux grands systèmes du monde” écrit en 1632 et dans lequel le savant soutient le système héliocentrique énoncé par Copernic reçoit un énorme succès. (source)
L’homme de soixante-dix ans devient alors un personnage connu qui commence à inquiéter l’Eglise. Cependant le recueil a reçu du pape «l’imprimatur», soit son approbation pour le diffuser en échange de certains changements afin qu’il respecte le décret papal. Ce décret demande à ce que les dires de Copernic soient traités comme des hypothèses et non des faits réels étant donné qu’aucune preuve n’a été apportée. Pourtant, Galilée n’en fait rien et ajoute une critique à l’encontre du pape dans son recueil. Ce dernier demande alors l’ouverture d’un procès qui se déroule un an plus tard au Saint-Office (Inquisition) de Rome. Sous la menace de la torture Galilée accepte d’abjurer* ne voulant pas suivre le destin de Giordano Bruno. La sentence est finalement rendue le 22 juin 1633.
« Il est paru à Florence un livre intitulé Dialogue sur les deux systèmes du monde, ceux de Ptolémée et de Copernic dans lequel tu défends l'opinion de Copernic. Par sentence, nous déclarons que toi, Galilée, t'es rendu fort suspect d'hérésie, pour avoir tenu cette fausse doctrine du mouvement de la Terre et repos du Soleil. Conséquemment, avec un cœur sincère, il faut que tu abjures et maudisses devant nous ces erreurs et ces hérésies contraires à l’Église. Et afin que ta grande faute ne demeure impunie, nous ordonnons que ce Dialogue soit interdit par édit public, et que tu sois emprisonné dans les prisons du Saint-Office. »
Galilée abjura donc et annonça alors publiquement s’être trompé :
« Moi, Galiléo, fils de feu Vincenzio Galilei de Florence, âgé de soixante-dix ans, ici traduit pour y être jugé, agenouillé devant les très éminents et révérés cardinaux inquisiteurs généraux contre toute hérésie dans la chrétienté, ayant devant les yeux et touchant de ma main les Saints Évangiles, jure que j'ai toujours tenu pour vrai, et tiens encore pour vrai, et avec l'aide de Dieu tiendrai pour vrai dans le futur, tout ce que la Sainte Église catholique et apostolique affirme, présente et enseigne. Cependant, alors que j'avais été condamné par injonction du Saint-Office d'abandonner complètement la croyance fausse que le Soleil est au centre du monde et ne se déplace pas, et que la Terre n'est pas au centre du monde et se déplace, et de ne pas défendre ni enseigner cette doctrine erronée de quelque manière que ce soit, par oral ou par écrit; et après avoir été averti que cette doctrine n'est pas conforme à ce que disent les Saintes Écritures, j'ai écrit et publié un livre dans lequel je traite de cette doctrine condamnée et la présente par des arguments très pressants, sans la réfuter en aucune manière; ce pour quoi j'ai été tenu pour hautement suspect d'hérésie, pour avoir professé et cru que le Soleil est le centre du monde, et est sans mouvement, et que la Terre n'est pas le centre, et se meut. J'abjure et maudis d'un cœur sincère et d'une foi non feinte mes erreurs. […] » “The Galileo affaire”
NB : Une légende veut que lors de son procès Galilée ait murmuré : “E pur si muove” ce qui signifie : “Et pourtant elle tourne” preuve que malgré son abjuration Galilée ne rejettera jamais sa théorie. Même si cette phrase n’est qu’une légende, elle est devenue symbole de la victoire de la science sur l’Eglise.
Grâce à son amitié persistante avec le pape Urbain VIII, Galilée n’est pas emprisonné, mais seulement assigné à résidence. Il n’est pas interdit de recherches ou de publications mais ne doit plus mentionner la théorie de l’héliocentrisme. Pourtant, lors de son procès, certains juges cardinaux sont en faveur de Galilée.
En effet, il n’a jamais attaqué la foi chrétienne. Il est également dit qu’il a pour but de réconcilier Bible et science, partageant la même foi que ceux qui le condamnaient. La doctrine* de Galilée est donc condamnée car elle reprend les thèses de Copernic, non démontrées complètement et non présentées comme simples hypothèses. Selon certains, elle est contraire aux Écritures de l'Église et donc jugée comme étant hérétique, mais certains autres religieux sont prêts à accepter cette découverte si des preuves sont apportées. Cependant, la provocation et la désobéissance dont fait preuve Galilée le conduisent jusqu’au procès. Toutefois, il n’est pas condamné pour hérésie ce qui prouve que l'Église n’est pas complètement réfractaire à ses théories.
L’Inquisition fut donc une grande menace pour les savants de la Renaissance. Véritable censeur, elle n’hésitait pas à condamner les ouvrages qui allaient à l’encontre du dogme de l’Eglise. La curiosité scientifique était condamnée par l’Inquisition, participant selon elle au péché originel. Le système héliocentrique fut la théorie qui bouleversa le plus l’enseignement de l’Eglise. Cette nouvelle hypothèse, contraire avec la vision de l’univers de l’époque était incompatible avec les écritures saintes qui justifiaient jusqu’à lors le système géocentrique de Ptolémée comme dit dans le psaume du livre de Josué.
“Or, tandis qu’ils fuyaient devant Israël et qu’ils se trouvaient dans la descente de Beth-Horôn, le SEIGNEUR lança des cieux contre eux de grosses pierres jusqu’à Azéqa et ils moururent. Plus nombreux furent ceux qui moururent par les pierres de grêle que ceux que les fils d’Israël tuèrent par l’épée. Alors Josué parla au SEIGNEUR en ce jour où le SEIGNEUR avait livré les Amorites aux fils d’Israël et dit en présence d’Israël : « Soleil, arrête-toi sur Gabaon, lune, sur la vallée d’Ayyalôn ! »
“Et le soleil s’arrêta et la lune s’immobilisa jusqu’à ce que la nation se fût vengée de ses ennemis. Cela n’est-il pas écrit dans le livre du Juste ? Le soleil s’immobilisa au milieu des cieux et il ne se hâta pas de se coucher pendant près d’un jour entier. Ni avant ni après, il n’y eut de jour comparable à ce jour où le SEIGNEUR obéit à un homme, car le SEIGNEUR combattait pour Israël.” (Josué 10,11-14)
NB : Ce passage de la bible a longtemps été utilisé contre Galilée lors de son procès.
Les découvertes scientifiques en astronomie de la Renaissance remettent donc en cause tout l’enseignement de l’Eglise, repensant la place de l’Homme et remettant en cause sa façon de concevoir l’univers. Cependant, il est bon de noter que si l’Eglise pouvait remettre en cause les découvertes scientifiques, les scientifiques pour la plupart n’étaient pas contre la religion. Ils étaient le plus souvent croyants voir même religieux eux-mêmes : Copernic était en effet chanoine. C’est pourquoi, même si les découvertes des savants étaient contraires à l’enseignement de l’Eglise, ils ne remettaient pas pour autant en cause la foi ou la Bible mais envisageaient une autre façon de penser et de concevoir le monde.
Martin Luther (1483-1546) était un moine allemand et théologien. Outré par les excès de l'Eglise, il est à l'origine de l'Eglise Luthérienne et de la réforme protestante. Sa façon de voir la pratique religieuse eut un grand impact sur la religion.
René Descartes (1596-1650) était un philosophe et savant français. Célèbre entre autre pour sa citation "je pense donc je suis" il souhaite créer une science universelle. Sa doctrine rompt avec celle étudiée dans les Universités.
Maffeo Barnerini (1568- 1644) est élu pape en 1623, succédant à Grégoire XV et prend le nom d'Urbain VIII. Admirateur et ami de Galilée il doit pourtant le faire condamner par l'Inquisition qu'il défendra pourtant pour lui éviter l'emprisonnement.
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